Grossesse

Héritage génétique des jumeaux : rôle de la mère et du père

1,6 million de jumeaux voient le jour chaque année dans le monde. Un chiffre qui fascine autant qu’il intrigue, tant la mécanique derrière la naissance simultanée de deux enfants reste enveloppée de mythes persistants. Si on a longtemps attribué le phénomène à un mystérieux « gène des jumeaux », la réalité est moins caricaturale, bien plus nuancée et résolument scientifique.

Jumeaux identiques ou fraternels : ce que la biologie nous apprend

Derrière le mot jumeaux se cachent plusieurs réalités biologiques. Deux enfants peuvent naître d’une même grossesse, pourtant leur patrimoine génétique diffère selon leur origine. Les jumeaux monozygotes, dits identiques, proviennent d’un seul ovule fécondé par un spermatozoïde, lequel donne ensuite naissance à deux embryons. Ils partagent alors le même code génétique, le même sexe et parfois même le même groupe sanguin. Dans certains cas, ils se retrouvent aussi à partager le placenta ou le sac amniotique, une configuration pouvant entraîner des complications graves, telles que le syndrome transfuseur transfusé. La mortalité périnatale, pour ces situations, reste au-dessus de la moyenne.

Quant aux jumeaux dizygotes, souvent appelés « faux jumeaux », l’histoire est différente : deux ovules, deux spermatozoïdes, deux génomes distincts. Leur lien génétique équivaut à celui de tout autre frère et sœur. Les différences peuvent aller jusqu’au sexe, aux caractéristiques physiques ou à la présence d’anomalies chromosomiques. Ainsi, il n’est pas rare de croiser un jumeau porteur de trisomie 21 alors que l’autre ne l’est pas.

Il existe également une forme rare, celle des jumeaux semi-identiques : ils résultent de la fécondation d’un même ovule par deux spermatozoïdes. L’ensemble du patrimoine maternel est alors distribué aux deux enfants, mais le bagage paternel se divise. Cette découverte récente complexifie la classification des grossesses multiples et fait entrer la gémellité dans de nouveaux territoires médicaux.

Qui transmet le gène des jumeaux ? Démêler le rôle de la mère et du père

La transmission génétique concernant les grossesses gémellaires ne se fait pas au hasard parmi les familles. Pour les cas de jumeaux dizygotes, la clé réside dans la poly-ovulation, autrement dit la capacité à libérer deux ovules au cours d’un même cycle. Ce phénomène ne concerne que la mère. Plusieurs gènes maternels entrent en jeu et certains ont été identifiés.

Voici quelques gènes connus pour favoriser la naissance de jumeaux :

  • FSHB : ce gène agit sur la production de l’hormone folliculo-stimulante (FSH). Une variante du FSHB rend plus probable l’ovulation multiple et donc la survenue de jumeaux.
  • SMAD3 : cet acteur régule la réponse des ovaires ; une mutation de ce gène accroît la répétition des ovulations sur un même cycle.

Ces versions génétiques spécifiques se transmettent par la branche maternelle et leur effet se retrouve dans plusieurs générations de familles de jumeaux.

La contribution du père, de son côté, reste nulle sur ce plan. Aucun élément du patrimoine paternel n’influence la capacité de la mère à produire plusieurs ovules à la fois. Toujours aucune trace chez les humains d’un gène paternel à l’origine d’une grossesse gémellaire spontanée. Chez les jumeaux monozygotes, leur apparition défie encore toute logique d’hérédité et demeure associée à des phénomènes biologiques mal compris.

Soeurs adultes avec leurs parents dans un parc automnal

Épigénétique et facteurs environnementaux : les nouvelles pistes de la recherche sur la gémellité

L’épigénétique a ouvert de nouveaux horizons dans l’étude de la gémellité. Un ensemble de facteurs liés au mode de vie, à l’alimentation ou au stress maternel peuvent agir sur les gènes, modifier leur activité et influencer le nombre de grossesses multiples. Plusieurs observations retiennent l’attention : dans certaines régions africaines, la consommation de patates douces riches en phytoestrogènes va de pair avec un taux élevé de naissances gémellaires.

Les avancées de la médecine reproductive ont aussi rebattu les cartes. Les techniques comme la fécondation in vitro (FIV) ou la procréation médicalement assistée ont entraîné une augmentation des naissances multiples en France et dans bien d’autres pays européens depuis les années 1980. L’âge maternel au moment de la conception a son importance également : avec l’âge, la poly-ovulation devient plus fréquente.

On constate des écarts selon les régions du globe : l’Asie reste peu touchée par les grossesses gémellaires tandis que certaines zones d’Afrique en recensent davantage. Cette variété pousse les chercheurs à s’intéresser aux effets croisés entre bagage génétique et environnement.

Reste à évaluer le poids de ces multiples facteurs sur le risque de mortalité périnatale, qui fluctue en fonction du contexte, du type de grossesse en question, et de la qualité du suivi médical. Ces données soulèvent des questions bien concrètes pour les familles et la santé publique.

Finalement, la naissance de jumeaux demeure un mystère à multiples facettes. Entre héritage maternel, états de vie et progrès médicaux, chaque histoire gémellaire dessine son propre chemin. Demain réserve sans doute encore bien des surprises sur ces liens qui défient les lois du hasard.